LE FIGARO : REPORTAGE - Les nouveaux maîtres du pays imposent peu à peu leur application très stricte de la charia dans la capitale afghane, menaçant barbiers, taxis et boutiques de mode.
Dans son petit local décoré d’affiches de mannequins aux coiffures excentriques, le barbier Hajji Barakatullah se fait aussi discret que possible. Lorsque deux jeunes hommes entrouvrent la porte dans l’espoir de se faire tailler la barbe, le petit homme rond se dépêche de la refermer sur eux, grommelant des excuses, l’air aussi dépité que ses clients perdus.
«Il y a une semaine, une poignée d’hommes armés ont fait irruption dans mon magasin. Ils m’ont ordonné de ne plus couper les cheveux à la mode occidentale, et de ne plus raser les barbes. Je dois leur obéir», explique-t-il. Son client du moment, un garçon d’une douzaine d’années, était tétanisé. «Il n’osait pas bouger. Il regardait la scène dans le miroir avec de grands yeux, comme si c’étaient des monstres», décrit le commerçant, une figure du quartier, qui a ouvert son salon il y a presque vingt ans.
Les talibans n’ont pas officiellement édicté de loi interdisant aux Afghans de se raser la barbe ou de changer leurs habitudes… Et les dirigeants, ceux-là mêmes qui jusqu’ici discutaient avec des diplomates étrangers dans de grands hôtels à Doha, n’ont de cesse d’assurer la population à grand renfort de communiqués diffusés à la télévision nationale qu’elle ne doit pas les craindre. Objectif: convaincre la communauté internationale, pourvoyeuse de l’aide internationale qui faisait jusqu’alors tourner le pays, que les talibans 2.0 sont prêts à reculer sur une partie de leur projet social. » | Par Margaux Benn | mercredi 8 septembre 2021
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