LE FIGARO: Pour échapper aux postes avancés de la CIA, le chef d'al-Qaida sait jouer de l'hospitalité pachtoune.
Pourquoi n'a-t-on toujours pas retrouvé Oussama Ben Laden, l'homme le plus recherché de la planète ? Au dire des services de renseignement occidentaux présents à Kaboul, il se cache dans les montagnes reculées du Waziristan, zone tribale pakistanaise frontalière de l'Afghanistan.
Le «cheikh» ne reste jamais très longtemps au même endroit. Il se déplace avec un tout petit nombre de gardes du corps, habillé comme n'importe quel paysan pachtoun local du Waziristan. Lorsqu'il aborde un nouveau village, il s'assoit avec le chef de la tribu, et s'arrange pour lui offrir, sans l'offenser, un généreux cadeau en numéraire pour l'entretien de sa mosquée. Il devient alors l'hôte de la tribu, intouchable selon le pashtounwali, le code d'honneur ancestral des Pachtouns.
S'il venait à l'idée d'un habitant de chercher à le dénoncer pour toucher la prime de 25 millions de dollars, ce dernier n'aurait de toute façon personne à qui rapporter l'information. Dans ces zones tribales autonomes, il n'y a jamais eu le moindre poste de police, du temps des Britanniques comme du temps des Pakistanais.
Dans les principales villes du Waziristan (Banna, Miramshah, etc.), la CIA a installé des minibases avancées, truffées de technologie, dans des maisons anodines, gardées en permanence par des hommes de l'ISI, le tout-puissant service secret militaire pakistanais. Les agents américains ne sortent jamais de ces bases secrètes, passant leurs journées à décrypter les interceptions téléphoniques, à scruter les images aériennes envoyées par les drones, à débriefer les espions pachtouns dépêchés sur le terrain par l'ISI. >>> Renaud Girard, envoyé spécial du Figaro à Kaboul | Lundi 14 Septembre 2009