LE MONDE – TRIBUNE : L’ex-ministre des affaires européennes travailliste Denis MacShane détaille, dans une tribune au « Monde », la manière dont la reine concevait son rôle institutionnel, notamment en ce qui concerne les questions internationales
Au Royaume-Uni, la règle constitutionnelle veut que le monarque britannique soit au-dessus de la politique, n’exprime aucune opinion politique et s’accommode de n’importe quel premier ministre, qu’il soit travailliste ou conservateur.
Le monarque est par conséquent un eunuque politique. Cependant, le terme ne peut pas s’appliquer à la reine Elizabeth. Elle s’est soumise à toutes les conventions mais avait des opinions et une culture politique propres à sa classe et à son éducation. Or celles-ci n’étaient alignées sur aucun parti. Le premier ministre avec qui elle s’est le mieux entendue était le travailliste Harold Wilson (1916-1995). Brillant intellectuel, il affectait de se présenter comme un homme sans prétention du Yorkshire, professant des idées dictées par le bon sens et affichant des goûts plébéiens acceptables par tous. Il refusa la demande du président américain Lyndon Johnson (1908-1973) d’envoyer des troupes britanniques au Vietnam et tenta l’adhésion du Royaume-Uni à la CEE (la future Union européenne), qui fut bloquée par le général de Gaulle.
La reine suivait de près les affaires internationales et lisait toutes les dépêches envoyées par les ambassadeurs britanniques au Foreign Office. Elle avait plaisir à parler avec Wilson. Dans ses Mémoires, il évoque les conseils judicieux que lui prodiguait un expert conservateur en affaires étrangères. Il ne le nomme pas mais avait confié avec un sourire à son assistant qu’il s’agissait de la reine. » | Denis MacShane, Ancien ministre britannique | samedi 10 septembre 2022
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