LE FIGARO: Décidés à vendre chèrement leur peau, quelques centaines de combattants sèment la mort parmi les rebelles.
L'alignement d'immeuble gris n'est qu'une ruine. De temps à autre, un gros nuage vient s'écraser sur les murs, ajoutant un trou aux façades déjà presque méconnaissables. Le bruit de l'explosion de la roquette se perd dans la canonnade générale. Aujourd'hui, au cœur de Syrte, la première ligne de défense des kadhafistes a été pilonnée sans relâche, comme depuis deux jours. Mais les ultimes défenseurs du Guide, jouant un va-tout insensé, ne cèdent rien. Retranchés dans l'ouest de la cité, dans un quartier qui ne fait pas plus de quelques kilomètres carrés, ils ne donnent même pas l'impression de se laisser gagner par la panique.
Face à eux, à une centaine de mètres tout au plus, les thuwars, les combattants rebelles, se plaquent au sol, grimpent dans les étages pour tenter de trouver un angle de tir. Sur un balcon mal accroché, un jeune homme, que son treillis délavé et ses rares poils de barbe ne parviennent pas à vieillir, épaule un lance-roquettes et fait feu avant de partir au plus vite se mettre à l'abri. Plus que tout, les rebelles redoutent les tireurs embusqués. Dans l'air les balles sifflent. Au coin d'une rue, dans l'ombre, Salah, l'air grave, pointe son fusil de haute précision Makarov sur les gueules noires que sont devenues les fenêtres. L'œil rivé à sa lunette, iI traque son alter ego ennemi. «C'est très difficile de les voir. Ils bougent beaucoup», murmure-t-il, l'air las. » | Par Tanguy Berthemet | Vendredi 14 Octobre 2011