Tuesday, June 21, 2011

Au Maroc, Mohammed VI garde la main

LE FIGARO: Le souverain chérifien propose des réformes sans précédent depuis l'Indépendance.

Avec le discours du roi du 17 juin, le Maroc est entré, douze ans après le début du règne de Mohammed VI, en transition démocratique. Maintes fois évoqué dans les premières années de gouvernance du jeune souverain, le processus s'est finalement enclenché à la faveur du «printemps arabe». Soucieux d'être à l'écoute d'un mouvement transnational en quête de réformes et de plus de libertés individuelles, le roi engage sa révolution tranquille en l'adaptant au particularisme marocain. Il change la Constitution en donnant des prérogatives élargies à un chef de gouvernement issu du parti vainqueur des élections législatives, mais se garde bien de remettre en question les fondements de son pouvoir.

Ce que propose Mohammed VI pourrait être comparé à un système présidentiel à la française plutôt qu'à la monarchie parlementaire espagnole où le roi est hors du champ politique. À la différence près qu'au royaume chérifien, le chef de l'État n'a pas à se représenter tous les cinq ans devant les électeurs et son nombre de mandats n'est pas limité.

Mohammed VI se taille sur mesure un domaine réservé pour assurer la stabilité du régime. Le souverain reste le maître du jeu dans les domaines régaliens de la défense, de la diplomatie et de la sécurité intérieure. Le roi est le chef des armées et accrédite ambassadeurs et diplomates. Un «conseil de sécurité intérieure», présidé par le monarque, est créé. Il aura, selon Mohammed VI, pour mission de «gérer les questions de sécurité internes, structurelles et imprévues». L'organisme va «compter parmi ses membres les chefs des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, les ministres, les responsables et les personnalités concernées». Qui tranchera en cas de désaccord? Le roi probablement.

Sur le plan religieux, Mohammed VI, «descendant du Prophète», conserve son autorité naturelle grâce au titre de «Commandeur des croyants» qui lui permet d'émettre des fatwas. La «sacralité» de sa personne en revanche disparaît pour être remplacée par une notion plus contemporaine de respect dû. Le libre exercice des cultes est garanti par le monarque qui rappelle toutefois que l'islam est la religion d'État. » | Par Thierry Oberlé | Lundi 20 Juin 2011